jeudi 24 décembre 2015

Sophie dans un petit bar du Marais

Quelle belle nouvelle, la chanceuse! Sophie passera les fêtes à Paris! J'aimerais donc être un petit oiseau pour voir ça…

Vous souvenez-vous de Sophie? Oui oui, celle qui portait un secret. Un conte de Noël créé l'an dernier à la demande du journal Sortie, de l'Alliance arc-en-ciel, à Québec. Publié en ces pages le 12 décembre 2014L'Extravaganza, un collectif de drag queens, en fera une lecture au bar Les Souffleurs, le 26 décembre, dans le Marais. Cela risque d'être une mouture colorée! Sophie ne craint rien.

J'ai beaucoup apprécié que le responsable prenne le temps de communiquer avec moi, dans le respect des droits d'auteur. Tous n’ont pas ce souci et cela est d'autant plus remarqué. Ils feront une soirée d'histoires de Noël. Du monde qui risque de se divertir!

Le secret de Sophie a maintenant une version longue qui se cherche une maison d'édition. Elle se promène, quoi! Le collectif lira la version brève, celle en ligne.

Sur ce, je souhaite à toute une chacune, le féminin incluant le masculin, un joyeux solstice, un gai Noël, de belles fêtes, une heureuse cosmogonie! Bref, amusez-vous bien en ce re-commencement du monde!



© Colette Bazinet 2015

lundi 14 décembre 2015

Le 12 décembre

À Québec, le 12 décembre, j'ai fait du vélo. Pas de l’entraînement d'hiver. Du bicycle ordinaire. Une belle randonnée à la mesure de ma forme pomme poire. La preuve que c'était ordinaire, d'une saison normale de vélo pour non entraîné : nous sommes passées près d'un terrain, d'une maison, où nous avons entendu la tondeuse. Une tondeuse de 12 décembre. Pas pour l'herbe, j'espère, mais plutôt pour déchiqueter les feuilles mortes. Enfin, nous ne l'avions point vu! Tout de même, c'est en octobre, cela, d'habitude! Le lendemain, j'ai entrepris deux brassées de lavage que j'ai étendues sur la corde à linge. Rien de raide, rien de glacé. La température flottait bien au-dessus du zéro. Ce n'est pas le réchauffement, persistent à se raconter certains, mais El Niño, l'enfant terrible. Le plus chaud connu. Mais ça n'a pas rapport.


© Colette Bazinet 2015

vendredi 11 décembre 2015

Ne pas rester dans l'attente

Écrire est un acte long. Pour moi, du moins. Par ailleurs, cette patience nourrit. Écriture, rêverie, lecture, cogitation, écriture, recherche, documentation, rencontres. Relecture, réécriture. Un processus lent et plein de charme dont je ne me lasse pas. La plupart du temps. À certains moments, il m'arrive de devenir incapable d’entrevoir le texte; je le fuis, je fugue, je dérape alors de maintes façons afin d'y échapper. Comme dans tout métier, il a ses heures moins lumineuses, voire sombres. N'empêche, il faut bien prendre congé aussi à l'occasion. Alors voilà, j'ai transmis un texte à quelques maisons d’édition : permission m’est accordée pour un répit. Mais.

Cela prendra des mois avant de recevoir une réponse, pour ceux qui en donnent une (oserai-je « qui daigne en donner une »?). D'autres mois et peut-être même des années avant qu'il soit publié, s’il est accepté quelque part, des éditeurs affichant des calendriers de production remplis pour les trois prochaines années. Peut-être ont-ils de la place et veulent-ils simplement ralentir les ardeurs des écrivantes et écrivants? Mission accomplie, je m’octroie une pause d'écriture. Après une quinzaine, voilà qu'un malaise s'insinue dans mon quotidien. Ce n'est pas que la dépression saisonnière ou le couvert nuageux qui ne nous lâche pas, ou le manque de lumière dû à l'absence de neige et la proximité du solstice. Il s'agit de cette sorte de marasme qui vous envahit lorsque vous perdez pied et confiance, que plus rien ne semble aller alors qu'aucun signal ne va pourtant en ce sens. Une atonie envahissante : la résultante de l'attente. Fin de trêve, il ne reste qu'une inertie malveillante. Avant que la sclérose ne s’établisse entière et complète - je la vois venir, elle m'est familière-, je dois agir.

Je sors un projet en cours et l'affiche à l'écran. Ne plus penser à l'autre, avancer. Seule médecine.



© Colette Bazinet 2015

dimanche 25 octobre 2015

Le poids des mots

  Tout aménagement consécutif à un déménagement a son lot d'impondérables gentiment appelés des surprises. Des voisins aux comportements étonnants : feux de camp directement sur le sol, le matin, à la limite des terrains des deux immeubles, lui les yeux dans le vague, biceps et tatouages exposés; elle, assise en retrait, maganée comme après une nuit trop courte, ou trop longue, et un merveilleux pitbull gambade, sans laisse, sur ce terrain non clôturé. Une insonorisation défaillante — heureusement compensée par des locataires attentifs auxquels nous tentons de répondre par la pareille; ou encore la buée qui s'invite allègrement dans les fenêtres et qui laisse entrevoir un long hiver au panorama givré. 

Jusque-là, ça allait. Je prenais la chose avec un grain de sel jusqu'au moment où un grain de sable s'immisce dans l'engrenage. Le tout se déroule dans mon bureau.
  J'avais installé un store romain en bambou, récupéré du logis antérieur. Je me méfiais. Plusieurs difficultés avaient été rencontrées tantôt dans la cuisine, tantôt dans d'autres pièces, lors de l'installation des toiles. Le pire, toutefois, s'était déroulé au moment de la fixation de tablettes murales. Une des chevilles refusait de se fixer, s'enfonçant béatement dans la cloison, fragilisant l'ensemble. Nous avons persisté en nous disant que nous n'y déposerions que des effets légers — après avoir grossi à trois reprises la taille des dites chevilles.

Le poids des mots
cb
   Dans le bureau, je commence par la fixation du milieu. Pas de problèmes. Puis celle de gauche : le mur me met en échec. Je passe immédiatement au calibre 3, après quelques prières et avoir tassé l'ancrage de 2 cm. J'enligne le côté droit qui m’attend. Un doute m’assaille. Non seulement les chevilles s'enfoncent et disparaissent, mais le plâtre au complet. D'une simple pression du doigt ! Je révise l'ensemble de mon vocabulaire religieux. Il ne suffit pas. Je tâte jusqu'à une illusion de fermeté et plante là le dernier support. Store installé. Je le garde à l'oeil. Après deux jours, il s'incline de plus en plus, menaçant. Avant que tout n'arrache, j'abdique et le décroche. 

  Que ferai-je de ma lampe suspendue ? Je l'ai pesée, puis j'ai magasiné le crochet adapté… mais je craignais la minceur du placoplâtre, cause du problème de solidité (et de sonorisation). L'ancrage suffirait-il ? La longueur de la vis fournie permettait un certain optimisme. Mais il n'était pas question que je risque la perte de cette lampe, souvenir de famille en plus d'être d'un verre dont la recette s'est perdue.

  Je visse et tombe sur du solide. Néanmoins, comment m'assurer de la sûreté du montage ?
Disposer du mou dessous pour amortir une chute éventuelle ? Tester avec une plante (quel dégât si ça flanche !) ? Il s'agit de s'assurer de la résistance du dispositif. Des livres, voilà ce qu'il me faut ! Les Robert 1 et 2 plus un Collins feront l'affaire… et le test. En riant, mon amie me suggère Antidote. Malheureusement, les supports virtuels sont, comme les âmes, immatériels. Il me fallait des mots qui ont du poids. Épreuve en cours.


*** 9 novembre 2015 : le sac des dictionnaires a vaillamment tenu le coup. J'ose suspendre la lampe. ***









© Colette Bazinet 2015
  



samedi 10 octobre 2015

un déménagement qui gruge

Quel été! Chercher un appart, faire des boîtes, choisir un déménageur, procéder, déballer, ranger, retoucher, classer, se décourager, suer. Quand ce n'est pas un choix, la motivation est mitigée, les émotions, du moins les miennes, s'orientant davantage vers la colère et la frustration plutôt que vers l'emballement à me convaincre que «c'est pour du plus!»

L'idée d'un bail se terminant le 31 août me revient. Éviter la cohue tant pour la recherche d'un habitat que pour la réservation d'un déménageur, payer un juste prix plutôt que le double lors des transbahutages du premier juillet. Il y a toujours des logements libres. En pleine pénurie, quand je suis arrivée à Québec à l'été 2001, j'ai emménagé dans les délais qui m'étaient alloués. Quand il a fallu agrandir parce que ma fille venait me rejoindre, j'ai trouvé pour le premier février. Alors, on a opté pour la date du premier septembre — en plein hiver quand même, on évite! Mauvais calcul. La belle saison y passe au grand complet. Mon journal de bord le confirme.

bateau stationnaire 
J'ai parcouru moins de 100 milles nautiques cette saison. Mon pire bilan de voile. Même l'année de mon cancer, qui s'était manifesté en juin pour une chirurgie en juillet, 137 milles avaient été parcourus. Et nous étions revenus parce que je ne pouvais me soumettre à l'imprévisible de la météo -- en sus de tous les imprévisibles que je vivais déjà. Un déménagement qui gruge plus de temps qu'un cancer, faut le faire! Quant à l'écriture, elle en a mangé un coup! Je suis arrivée à terminer deux textes au début de l'été, mais là, faudrait que je les finalise, ces chers!

Et là, trop tard, le nouveau bail court de septembre en septembre. J'aurais dû opter pour mai.




© Colette Bazinet 2015

mardi 15 septembre 2015

Espace de travail

Je fais un test : écrire le portable sur les genoux. Je viens enfin de dégager mon bureau afin de pouvoir y déposer mon ordi. Problème. La pièce a une bonne surface, toutefois insuffisante pour y ajouter un petit meuble. Et ma table de travail est trop haute pour le clavier et, de toute façon, je veux conserver une aire libre pour l'écriture manuscrite. Je ne m'encombrerai quand même pas d'un bureau en coin! Oui, je commence à m'extirper du désordre du déménagement. M'enfin!

Mentionnons que cela a pris douze heures à trois hommes, et jusqu'à cinq les deux dernières heures. Nous n'avons pourtant pas tant de meubles. Quoique. Pour mon bureau par exemple : une table de travail, un classeur à quatre tiroirs, trois bibliothèques sans compter la moitié du garde-robe double rempli de documents. Ce fut un gros déménagement de boîtes. Boîtes et cossins. Minimum 200. Je lis, j'accumule des documents, des éléments de recherche pour des textes en cours ou à venir. Ben, ben, ben de la paperasse. Et quelques souvenirs que je ne sors parfois même pas de leurs boîtes : rangées telles quelles. Je vous vois rire. Faites!

Et dans cette pièce, de plus, je ferai un coin lecture : fini les conflits télé contre livre. Coudons! Ça ne va pas si mal sur les genoux. Ce sera l'option pour le moment : une petite tablette coussinée à déposer là où il le faut, que je sois à mon bureau ou confortablement étalée dans le salon. Hum, intéressant! Je peux enfin me remettre à la tâche. Histouaire de Noël et roman-en-cours, tenez-vous le pour dit, je vous reviens.




© Colette Bazinet, 2015


vendredi 28 août 2015

Espace interstellaire

30 août, débranchement.
2 septembre, retranchement.

Intemporalité où nous flotterons dans un espace indéterminé, barricadées dans des zones domiciliaires sans ondes. Aventure intersidérale. Silence radio.

C'est fou!

dimanche 2 août 2015

Retour de Trabouler à la Fierté


Fierté littéraire

                                                                               


   À Montréal, dans le cadre de la fierté gaie, advient à nouveau la fiesta de la fierté littéraire du 11 au 15 août. Alors oui, j'y participerai. La soirée inaugurale s'ouvre avec un micro ouvert auquel je n'ai pu résister, d'autant plus qu'il se déroule sur la thématique de l'humour. Nous serons une trentaine, je crois, à en faire autant.   Trabouler n'a pas terminé son parcours! L'extrait choisi amusera, je l'espère!

  Puis lors de la journée communautaire du samedi 15 (de 11 heures à 17 heures), un salon du livre de la fierté se tient et le roman y sera disponible, ainsi qu'une foule d'autres titres de la communauté. Ma période de signature et de présence est prévue de 13 heures à 15 heures, mais je déambulerai dans les parages le reste du temps. Sur la Sainte-Catherine, bien sûr! Entre Saint-Hubert et Papineau.
 
  Et pour ceux et celles qui ne pourront y être, sachez que la librairie Zone Libre, partenaire de l'événement, aura Trabouler sur ses étagères pour plusieurs mois.

La soirée inaugurale et son micro ouvert débute à 19 heures à l'adresse suivante :
  • Galerie D
  • 1200 Amherst, Local 102
  • Montréal, Qc, H2L 3K8
  • t: 514 523-5535




mercredi 8 juillet 2015

Ces morts que je croise


J'avais amarré L’Opium à Saint-Jean-Port-Joli et flânait sur le pont. Comme ça, du coin de l'oeil, furtivement, une silhouette marchant allègrement sur le quai fédéral attira mon attention. Lise ?
J'observai plus attentivement la femme, cheveux et foulard au vent, droite, à la fière allure, le pas dynamique. Malgré la distance, plusieurs centaines de pieds du bateau, c'était bien elle. Lise. Seul problème, elle est morte et enterrée.
Puis il y a cet homme que je ne cesse d'apercevoir ou de croiser. Sur les places de village, les chemins, dans les parcs ou les centres d'achats. Âgé, le dos un peu courbé, chapeau Tilley à large bord. Immobile, souvent, cherchant à déjouer son équilibre chancelant. Déambulant lentement, à petits pas. Il semble toujours chercher quelque chose. Par terre ou ailleurs. Mon coeur accélère à chaque fois. Mon père, avec sa fragilité vieillissante, un corps qui ne traduit plus l'assurance du discours. Lui aussi décédé. Trois mois après Lise, ma quasi-belle-soeur.
Prête à larguer les amarres
crédit photo Chantale Côté ©
Le dernier, je le frôle dans les foules. Rue Saint-Jean à Québec, entre autres. Par jours ensoleillés. En touriste ou joyeux luron. Ce barbu jovial avance à grands pas. Rattrape-t-il le temps à ses yeux perdu ? Je le vois avec vingt, trente ans de moins qu'à son décès, époque où je l'ai davantage fréquenté. Mon ami Pierre. Parti l'année passée. Je pense. Je me mêle dans les calendriers.
Comme tout un chacun, au fil du temps, je cumule les morts. Des proches, d'autres non. Des morts touchantes, des troublantes, des brutales, des lentes, des subites, des lointaines, des anciennes que j'apprends longtemps après les faits. Ces trois-là m'accompagnent fréquemment. Lise, la battante - était-ce pour répondre aux espoirs de tes enfants et de ton conjoint que tu as accepté les dernières chimios ? Mon père qui a à peine pu réaliser qu'il se mourrait. Pierre le colérique, furieux de ne pas avoir concrétisé tous ses rêves.                                                 
  J'ai cru devenir folle de les voir ainsi surgir inopinément, puis j'ai accepté. Leur présence demeure, incontournable.  Au  travers les évocateurs, je glisse un mot à mes morts, une pensée va vers eux — ou vient à moi. Voilà le sens de la résurrection chez les anciens Sémites. Jésus, qu'un cas parmi les autres. Les chrétiens l’ont monté en épingles. 
Ces morts qui nous accompagnent vivent tant que nous poursuivrons le dialogue avec eux.
Salut vous autres ! Je vous aime.



© Colette Bazinet, 2015


lundi 15 juin 2015

Austérité, osté… À mes amiEs chômeuses, déplacées, tassées



 Je ne suis bonne ni en politique, ni en économie. Cette austérité qui, supposément, ne touche personne ne cesse pourtant de fesser autour de moi.
En partant, une amie a perdu son poste dès l’entrée en fonction de ces élus. Un emploi auquel elle aspirait depuis une dizaine année après avoir occupé moult métiers. Elle a même décliné la permanence d’un emploi moins bien rémunéré pour occuper ce poste tant rêvé − mais occasionnel − qui correspondait enfin à son expérience (parce qu’elle a longtemps travaillé dans son domaine)  et à sa formation. Sélectionnée après des examens, des entrevues, parmi des milliers de candidatures – un processus coûteux que le gouvernement venait de balayer en dépenses inutiles. Et éliminer le personnel occasionnel, ça ne compte même pas aux yeux du gouvernement. Ça réduit la masse salariale, une dépense, mais pas le nombre d’ETC (emplois à temps complet), la réduction réelle visée. Ce n'était pour eux que le début de l'exercice. De toute façon, des occasionnels, ce ne sont pas de vraies travailleuses et vrais travailleurs, même si sélectionnés à grands frais, même si produisant du vrai travail, même si elles ont un vrai loyer à rencontrer et de la vraie bouffe qui augmente à payer. Mon amie s’appauvrit depuis longtemps.
 Et cette autre amie qui a travaillé dans des organismes communautaires. Contrat fini. Subventions coupées. Chômage épuisé. Au bout du rouleau.
 Et cette autre amie, éducatrice spécialisée auprès d'enfants vivant avec une déficience physique. Elles étaient six, quatre postes coupés. Quatre personnes avec des familles, des conjoints ou seules. Et les tâches qu’elles effectuaient? Le gouvernement ironise, prétendant que les services à la population ne seront pas chambardés. Ben voyons donc!
 Un gestionnaire de ce genre d’organisme a prétendu que sa liste d’attente se maintenait toujours à trois mois. Comment font-ils cela? Avant, ils traitaient des cas classés de modéré à sévère. Ils ont éliminé tous les modérés. Un enfant de quatre ans en attente s’est fait fermer le dossier – claquer la porte. Cas pas assez lourd. Et l’enfant ne bénéficiera pas d’aide à l’école – qui assurait en principe les suivis légers (donc l’étape suivante) − là aussi les services sont coupés. Le petit tombe dans le vide. On peut espérer : son cas, sans suivi, deviendra probablement sévère avec le temps. Il sera moins adapté, prendra l’école en grippe, se dévalorisera. L'estime de soi à zéro, les acquis anéantis, il deviendra à nouveau admissible.
Rien n’aura été épargné, les coûts humains et financiers ne sont que reportés et augmentés. On le sait pour un char ou une maison! Si l’on ne s’occupe pas des petits bobos, ils deviennent de gros bobos! Ça coûte plus cher au bout du compte. C’est de la frime de parler d’un souci d’équité intergénérationnelle!
Il y a des décisions qui demeurent à mes yeux profanes de véritables mystères. Par exemple, à Québec, un organisme en santé comptait environ 150 employés. La restructuration de 1996 avait amené le compte à 1300. La fusion décrétée le 1er avril 2015 augmente le chiffre à 17 000 employés. Je me demande comment on peut économiser en créant une si grosse boîte à gérer, sans compter toute la désorganisation, la réorganisation, l’incertitude, les balbutiements que cela entraîne. Chaque fois qu'un organisme ou qu'un ministère change de nom, il y a des masses de frais qui s'accumulent (papeterie, changements dans l'organigrouille, déménagements même, parfois). Et je n'ai pas vu souvent (pas du tout même, de mémoire) des cadres perdre leur emploi, cela ressemble davantage à un jeu de chaises musicales auquel aucune chaise n'est jamais enlevée.
J’ai vu des organismes communautaires vivre sur leur marge de crédit, des salaires non versés ou retenus, les efforts de plusieurs années s’effondrer par manque de ressources ou par la paralysie entraînée par les délais imposés par les prises de décision du gouvernement.
Je suis inquiète pour mes amies. Les quinquagénaires ont eu, pour plusieurs, des carrières en dents de scie. Le marché de l’emploi était saturé, la permanence s’était refermée, la marchandisation non pas du travail, mais des travailleuses et des travailleurs a pris le dessus. Nul n’ignore que les plus de 50 ans sont mal reçus sur le marché du travail qui n’en a, supposément, que pour les jeunes (entendons par là les moins de 35 ans). Je leur souhaite tout le succès possible, à ces jeunes. Ils vont défrayer les coûts tantôt, eux aussi, pour ces décisions. Nul n'échappera au collimateur.
Y aurait-il moyen de travailler sans être considérés comme des moins que rien et une charge sociale? Je connais peu d'employeurs qui crachent avec autant de facilité sur leur personnel et font applaudir les foules. Quand on dit que nous payons de nos taxes ces salaires, j’ai juste le goût de dire que nous payons de nos poches tous les salaires, tous! Quand j’achète mon litre de lait, des gens sont payés de la vache au présentoir réfrigéré, incluant le présentoir. Même chose quand j’appelle pour demander un renseignement, au privé ou à l’état, quelqu’un répond (ou a enregistré le message!).
Et pour ce qui est des plus démunis, qu’une société s’en occupe devrait être une source de fierté! Et personne ne peut affirmer que cela ne lui arrivera jamais, d’avoir besoin d’aide, de soutien, de soins. Lui ou un proche. 
 Il y a des dépenses qui me gênent, par exemple de tout vouloir réorganiser tout le temps – extrêmement dispendieux –, de donner des bonis à des cadres parce qu’ils coupent des postes et que ce soit reconnu comme critère de bonne gestion, les façons d’octroyer des contrats qui mènent à des abus salés. Et les indemnités de départ, quel petit salarié a droit à quelque chose quand on le remercie?
Ce que je vois autour de moi? Des postes coupés, des heures coupées, des services coupés. Je ne suis ni politicienne ni économiste. Je suis humaniste. Les gens ne sont pas une colonne de dépenses. Pour qu’une économie roule, il faut, paraît-il, dépenser. Pour dépenser, cela prend de la confiance, non de la précarité. Et encore, faut-il qu’il reste une population suffisante avec des revenus convenables.  
Être élu par moins de 30 % de la population (± 40 % du vote exercé), ça ne donne pas tous les droits. Vous confondez, messieurs, majorité de sièges et consensus social. Les fesses assises, seules, ne suffisent pas! C'est pour cela qu'il existe de mécanismes démocratiques telles les commissions parlementaires qui discutent et cherchent à améliorer les projets de lois, ou à faire refaire les devoirs, comme on dit. Votre austérité est comme l’ostéoporose. L’os semble là dans sa forme. Squelette illusoire, car poreux, la moitié de lui-même, dangereusement fragilisé.



© Colette Bazinet, 2015

lundi 8 juin 2015

Montréalocentrisme

Couverture du livre     Je n'y échappe pas. J'ai beau vivre à Québec depuis 14 ans et n'avoir habité Montréal qu'environ quatre années depuis 1987, ma ville natale est génétiquement inscrite en mon for intérieur. Malgré tout ce temps ailleurs, fréquemment, lorsque je quitte le domicile pour la métropole, je dis que je vais à Québec et lorsque j'en reviens pour rentrer chez moi, je quitte Québec plutôt que Montréal ! Ma maison intérieure est imprimée à Montréal, le nombril du monde — du mien, du moins —, concluraient les anthropologues. Je vois déjà tous mes amis et amies de la capitale se hérisser de mon manque de reconnaissance et refleurir la vieille et chaude lutte de notoriété entre les deux agglomérations. Pourtant, je vous assure, ça n'a rien à voir. Freud analyserait sûrement ce lapsus avec beaucoup d'intérêt. C'est génétique. C'est tout et cela dit tout. La preuve.

     D'abord la preuve de mon implication dans ma ville d'adoption (je me déclarais d'ailleurs néo-québécoise à mon arrivée ici). J'ai assisté à l'assemblée générale de l'Institut canadien, vénérable institution de la Capitale. De nombreux prix de présence furent tirés. Des livres pour la plupart, l'Institut chapeautant notamment le réseau des bibliothèques de la ville, le festival Québec en toutes lettres et la future Maison de la littérature, dont l'ouverture officielle est prévue début octobre. Je fus des heureuses gagnantes. Tout de suite, mon dévolu se jeta sur le dernier roman de Monique Proulx, Ce qu'il reste de moi… qui se passe à Montréal ! S'cusez la ! Ça remonte tout seul, le montréalocentrisme.











© Colette Bazinet 2015

dimanche 24 mai 2015

une note arc-en-ciel sur fond marine

Parce que la barre est franche, elle ne pouvait qu'être marine. Je n'ai pu m'empêcher de lui donner une touche d'arc-en-ciel. Après au moins quatre années de cogitation, l'achat d'une machine à coudre suivi d'un cours de couture, voilà enfin la nouvelle venue : la barre franche dotée d'un étui !

Pour les non-initiés, un bateau est muni d'une barre pour le diriger, lui donner une direction. Cette barre est soit une barre à roue, c'est-à-dire semblable à un volant de voiture ou telle que l'ont peut en observer dans tout bon film de pirates, soit une barre franche, c'est-à-dire un simple manche ou bout de bois si vous préférez. L'Opium xxx est gréé d'une barre franche. On lui fait un étui pour la protéger, notamment des rayons UV.

Eh non, elle n'est pas encore à l'eau. Il vente tant à l'île que même les grands voiles ne sont pas installés et moins d'une dizaine d'embarcations flottent dans le bassin de la marina. J'ai terminé de petits travaux sur le safran — partie du gouvernail —, la coque est cirée, le ménage intérieur complété. Nous sommes fin prêtes !


Le bout de métal se trouve sous la barre sert à fixer un pilote automatique. La partie à gauche est celle que l'on fixe au safran, le tout formant le gouvernail.




© Colette Bazinet 2015

jeudi 7 mai 2015

Accouchement avant l'été!

C'est bien parti. Recherche, écriture et recherche et réécriture et réécriture. Révision accomplie. Correction en cours, le tiers complété. Je devrais accoucher de ce second roman avant l'été. Je l'enverrai sous peu en première lecture et puis… je verrai. J'ai un doute, peut-être restera-t-il dans les tiroirs.

Parfois, l'important, c'est de terminer un projet, peu importe la suite. Tout comme les thèses de doctorat. Leur première vertu est d'être déposées.

mardi 31 mars 2015

Quand Noël fleurit deux fois

Il y a des moments, comme cela, où la magie fleurit à nouveau. Un cactus de Noël vivant chez nous nous offre régulièrement deux floraisons annuelles. Un faux, me diront les férus de botanique, les vrais ne le font qu'une fois. Alors, ajustons le propos. Notre faux cactus de Noël, dont j'ignore la dénomination scientifique et que ma faible passion pour la chose horticole ne me pousse pas à identifier du bon cru, s'épanouit souvent deux fois par année. Habituellement consécutives. Sans que la première soit tout à fait achevée, la seconde s'enclenche pour notre plus grand bonheur et celui des petits — qui surveillent ces éclosions de près et avec respect. Les manifestations se tiennent à l'automne, d'où l'appellation de Noël plutôt que de Pâques, déjà entendue pour désigner ce noble végétal domestique, cousin sans doute du premier mais à épanouissement printanier.


Voilà qu'il nous joue un tour, dédouble sa personnalité ou cherche à nous convaincre de schizophrénie : après s'être déployé en parfaite concordance avec le solstice d'hiver, il récidive pour le dimanche qui suit la pleine lune qui suit l'équinoxe du printemps, la pâques catho, historiquement soulignée au Québec par des jours payés et chômés (du latin se chauffer au soleil comme m'a appris Richard Desjardins), une dinde ou un jambon, c'est selon, et surtout bien du chocolat et autres oeufs sucrés.

Notre faux cactus de Noël portera dorénavant deux noms, comme bien des enfants, soit faux-cactus-de-noël-et-de-pâques.
Le printemps veille à nos portes, prudence, il pourrait nous surprendre.
 :o)





© Colette Bazinet, 2015

vendredi 13 mars 2015

Le temps suspendu


  L’air vivifie. Nous marchons d’un bon pas, exercice modéré. Pour une deuxième année consécutive, nous nous sommes inscrites au Défi santé. Objectif personnel : un peu plus d’équilibre dans ma vie, plus de place pour mon corps, qui en prend déjà pas mal, mais pas de la façon désirée. Il lui faut s’extirper de cette chaise prétendue lieu créatif et productif.
  Jeudi après-midi, des gens circulent, se pressent, font des courses. Les voitures s’attardent à peine à l’arrêt supposément obligatoire. Le soleil printanier nous assaille joyeusement. En passant devant l’église de pierres, mon amie monte les marches et vérifie la porte. Inutile, me dis-je. De nos jours, la crainte du vol domine et ces lieux demeurent rarement accessibles hors des horaires de culte. Surprise! Le portail s’entrouvre. Nous pénétrons dans l’antre.
  Pénombre. Les vitraux filtrent la lumière. Aucune âme ne semble flâner ni dans la nef, ni dans le chœur. Nous nous croyons seules lorsque l’orgue se met à résonner. Une soprano l’accompagne. Je m’assieds dans la rangée du fonds, sur le banc ciré, usé, contournant soigneusement l’agenouilloir descendu. N’émettre aucun bruit. Ralentir. J’oublie ma compagne rendue plus loin. Le rythme de ma respiration se modère. Les sons extérieurs sont anéantis. Il n’y a plus d’écoulement temporel, l’horloge pourrait pointer n’importe quel moment du jour ou de la nuit. La voûte m’impressionne. Si haute. Afin de permettre aux âmes de s’élever, de s’approcher des dieux. Un espace de calme s’installe en moi. L’organiste recommence, le chant s’enchaîne. De courts dialogues, elles reprennent la mélodie. Un leitmotiv incessant, imprégnant, flippant. Sont-elles deux, ou davantage? Je ne distingue pas bien. Qui chante, qui joue? Des femmes, du moins. Je me perds dans mes pensées. Un vieil homme entre et s’agenouille à l’arrière, loin de moi. Puis un second se présente. Il se dirige à l’opposé, vers l’avant. Deux vieillards qui se recueillent. Viennent-ils bavarder avec leur conjointe défunte… ou leurs amours interdits? Ces attitudes humbles, courbées, de piété, me fascinent. J’y aspire pourtant, incapable de taire les chuchotements intérieurs. Une flamme oscille dans la lampe de sanctuaire. Elle indique la présence de leur dieu dans le tabernacle. Ces mots toujours présents, venus d’ailleurs et d’une époque si lointaine.
orgue au monastère

  Je rêvasse. Une femme avance, la tête inclinée, pudique, évitant de croiser mon regard. Les voix du jubé discutent, elles n’auront pas le temps de tout voir, une dernière fois pour aujourd’hui. Musique et fin. Je n’observe pas, j’erre. Ces monuments trop vastes. Les yeux fermés, je choisis de me laisser imprégner de l’atmosphère intemporelle. Est-ce cela l’éternité?
 Ma compagne s’approche et sourit. Ah oui, il faut sortir, poursuivre notre ballade. J’adore m’arrêter dans les temples de toute confession - ne souscrivant à aucune. Un apaisement.
  La halte a duré tout au plus cinq minutes. Comment cela se compte-t-il en temps suspendu?


 © Colette Bazinet 2015

mercredi 18 février 2015

Les dérives du quotidien

Cours de couture, je n'écris pas. Trois jours à compléter un ajustement. Atelier d'écriture, je narre, assurément, mais à d’autres fins. Visite de la proprio : avis d'éviction du logement. Journées à évaluer, calculer, discuter des options possibles. Pas de prose créative.
Pourtant, pourtant. Je tourne autour du pot, si près du but.
C'est pour cela sans doute.
Ce roman sera soumis à l'édition en 2015: mon engagement vis-à-vis moi-même.
Suis-je encore une fois fidèle à l’adage : Courage, fuyons ?
Peut-être bien, peut-être pas. La créativité s'amuse souvent de nous, nous menant par des routes inattendues au port souhaité.
Confiance. La couture se termine samedi. L'atelier d'écriture en mars. Et je ne passerai pas six mois non-stop à la recherche d'un gîte et dans le remplissage et le vidage de boîtes.
Le roman arrivera à terme. Que la neige neige.





© Colette Bazinet, 2015

vendredi 30 janvier 2015

2015, des résolutions

   Chaque année, je me fixe des objectifs. Pas pour m'ennuyer. Pour me stimuler, me pousser un peu en avant. Se pousser, me direz-vous ? Encore ? Pourtant oui. Pas question ici de produire sans cesse et toujours davantage. Simplement, éviter de déprimer en sombrant dans le néant. Entre la vacuité et la surproduction, il y a la vie. Me donner des buts m'aide à être dedans, la vie. Certains me croient contemplative, voire hautement spirituelle. En réalité, je risque la chute en mode neurovégétatif passif et cherche à ne pas trop débrancher. Me fouetter m'énergise, comme une belle journée le nez dans l'air frais à pelleter des nuages de neige.
   Je ne les réalise pas toutes ces résolutions et, de plus, ce n'est pas grave. Parmi celles-ci, certaines concernent strictement le plaisir. Elles non plus ne se concrétisent pas toutes, mon côté travailleuse compulsive prend parfois le dessus. Toutefois, je refuse la culpabilité, luxe inutile.
   En 2014, par exemple, parmi mes objectifs se rencontraient: alimenter vingt fois ce blogue — je l'ai fait 19 — et terminer la réécriture d'un roman en chantier pour lequel, initialement, aucune échéance n’était bloquée. Le 3 janvier 2015, la réécriture était complétée, je pouvais entrer en mode révision.
   Alors en 2015, je tenterai mes 20 rencontres sur ce blogue et je souhaiterais achever la rédaction de ce roman afin de le soumettre à des éditeurs. Voilà, c'est dit.

et je continuerai à pratiquer le ukulélé, et j'apprendrai à utiliser ma machine à coudre, et je partirai en voilier, et j'aimerai, et j'aimerai.




© Colette Bazinet 

samedi 10 janvier 2015

Le courage des croyants



Hier soir, après le téléjournal, Radio-Canada diffusait le documentaire de Daniel Leconte C'est dur d'être aimé par des cons, tourné lors du procès contre Charlie Hebdo en 2007. À voir. 
Ce que j'ai le goût de retenir de l'équipe de cet hebdomadaire, c'est leur amour de la liberté et la conscience de son prix. La foi de ces athées affirmés retentit au-delà des frontières. Bien sûr, l’athéisme n'est pas nécessaire pour croire en l'humanisme, mais je crois que leur inébranlable conviction nous invite tous à une introspection. Pour ma part, j'aimerais avoir leur courage, mais trop souvent la peur l'emporte. Et quand je vois que des médias nationaux comme BBC ont décidé de ne pas diffuser les caricatures controversées (n'est-ce pas le rôle d'une caricature?), je m'inquiète non seulement de mon courage, mais de celui du pays que j'habite.

Je ne sais pas pourquoi reproduire l'image du prophète est proscrit. À ce que j'ai lu, l'interdiction ne relève pas du Coran. Et si cela relève de l'époque de Mahomet, peut-être ne voulait-il tout simplement pas être déifié. Dans les religions monothéistes, ce sont habituellement les représentations de dieu qui sont interdites, afin de ne pas idolâtrer les représentations. Ici, l'effet contraire s'est produit, du moins pour les terroristes qui ont manipulé ce tout pour la rendre conforme à leur vision. Tout cela me laisse perplexe. Toujours est-il qu'au début, le terrorisme me faisait vivre de l'impuissance.

Aujourd'hui, l'attaque contre l'équipe de Charlie Hebdo me ramène à la fierté de mes idéaux de liberté, d'égalité, de sororité et de fraternité. Que les gens qui se réclament des idéologies extrêmes et violentes, de l'intégrisme musulman ou du fondamentalisme chrétien se le tiennent pour dit. La terreur et la violence n'auront pas gain de cause ni sur la plume libre ni sur le vivre sain. Même pour le Nigéria, je garde espoir, les populations continuent avec courage de réclamer leurs filles. Qu'on les soutienne, concrètement! J'y crois.




© Colette Bazinet, 2015